A l’assaut de l’échec scolaire depuis dix ans. 22 fév 2010

Introduction ou extrait
L’association "Lire et faire lire" a bâti depuis dix ans un formidable réseau de lutte contre l’échec scolaire et l’exclusion avec une armée de 12.000 bénévoles retraités qui racontent des histoires aux enfants en difficulté et transmettent du plaisir.
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"C’était un désespoir de voir l’immensité de "notre" échec scolaire. Celui de tout une société", explique à l’AFP l’écrivain et cinéaste Alexandre Jardin, l’un des fondateurs de l’association qui célèbre cette année ses dix ans et a déjà touché plus de 250.000 enfants dans 5.000 maternelles, écoles primaires, centres de loisirs, hôpitaux ou crèches à travers la France.
Les 65 écrivains du Comité de soutien de Lire et faire lire, dont le romancier Daniel Pennac, joueront les ambassadeurs tout au long de l’année.
"Il y a dix ans, j’avais constaté comme tout le monde que ne pas maîtriser l’écrit aboutissait à l’exclusion et l’exclusion à la violence. Au contraire, l’apprivoiser et mieux, y prendre plaisir, vaccine contre l’échec", poursuit M. Jardin.
"Quand un petit n’éprouve pas de plaisir en lisant, il est en danger", résume l’auteur de Fanfan ou Le Zèbre, dont l’oeuvre regorge d’amour et d’enfance. "Il y a une forte corrélation entre niveau du lexique et niveau de violence".
"Le bilan de ces 10 ans est extrêmement positif", souligne à l’AFP Gérard David, président de l’association et ancien de la Ligue de l’enseignement, grand opérateur de Lire et faire lire avec l’UNAF (Union nationale des associations familiales).
Il a fallu dès le départ trouver subventions et sponsors, faire un long travail de déminage administratif.
Et Lire et faire lire veut grandir. "Nous voulons démultiplier nos actions, développer partenariats et mécénat, recruter des bénévoles, ouvrir de nouveaux lieux, notamment dans les collèges", relève M. David.
Une grande rencontre de quelque 400 bénévoles et coordinateurs sera organisée en octobre à Epinal (Vosges) pour dresser un bilan et parler de l’avenir. Un colloque sur la transmission entre générations aura lieu en 2011.
"Les livres, ce sont des cadeaux. Ce que je lis aux enfants, c’est aussi ce que je suis, mon passé, le temps que je leur donne", explique à l’AFP Marie-France Lecuir, bénévole depuis dix ans dans le quartier sensible du Mirail à Toulouse.
"On ne sait pas s’ils vont vraiment progresser, si on est utile. Il faut être modeste", tempère la jeune retraitée. "Mais je les fais évoluer... et rire. Lire une histoire, c’est un moment magique", ajoute-t-elle.
Et au Mirail, c’est aussi faire entendre du français "écrit" à des enfants dont ce n’est souvent pas la langue maternelle, avec de nouvelles références culturelles, comme le loup du Petit chaperon rouge.
"Un jour, un enfant m’a demandé : "Tu n’as pas trop de mal à t’intégrer, toi ?", raconte émue cette Parisienne, "immigrée" à Toulouse.
Les bénévoles, à 90% des femmes, lisent des histoires à des groupes de quatre ou cinq enfants chaque semaine. Ils suivent des formations pour les initier à la littérature jeunesse, la lecture à haute voix...
Leur taux de réengagement chaque année "est colossal", souligne Alexandre Jardin.
"La clé, c’est que cela recoud une société. Des liens sont tissés aussi entre anciens et nouveaux Français. Cela change le regard des enfants et celui des retraités", ajoute-t-il.
"On continue à croître mais doucement. Cependant, nous pourrions connaître une grande extension, avec une nouvelle stratégie et un nouvel allié", confie Alexandre Jardin, en ménageant le suspense.

 

PARIS, 22 fév 2010 (AFP)